mardi 3 avril 2007

FIN DE SEANCE




Le couloir sent l'eau de Javel et le déodorant bon marché. Les toilettes se trouvent au fond, près d'une issue de secours. J'avance sur la pointe des pieds dans la faible lumière dispensée par une loupiote au plafond. Les râles de la fille sur son tonneau sont amplifiés par les enceintes derrière l'écran tout proche. Des relents de pisse aigrelette et de parfum sucré se mélangent à l'entrée des toilettes, un local étroit muni d'un lavabo et de deux cabines. J'entre, les hommes alignés devant une cabine ouverte en grand ne prêtent pas attention à moi. Au fond d'une poubelle en plastique, des lingettes pleines de foutre.

J'avance d'un pas et découvre un spectacle incroyable dans la lueur jaunâtre d'un néon : La mystérieuse femme assise sur le couvercle d'un siège de WC, son imperméable ouvert laisse voir ses seins ronds, qui tombent un peu sur les côtés, mais encore fermes. Une culotte blanche masque son bas ventre. La bouche crispée dans l'effort, elle branle un des spectateurs dont la queue sort de la braguette. C'est déjà la fin pour lui, il grogne et crache dans la paume de la femme à la figure d'un blanc laiteux. Il la remercie d'une courbette et va s'essuyer au lavabo. Puis, discret, sans se retourner, il sort pour voir la suite du film. Lorsqu'elle a épongé le dernier, je me retrouve face à elle. J'ai le coeur qui bat, mais malgré mon érection, je n'ai pas le courage de m'exhiber devant elle. Passée une curiosité fugitive identique à celle manisfestée tout à l'heure à mon égard dans la salle, la femme a un sourire énigmatique. Elle se rajuste en nouant la ceinture de son imperméable, et je regrette la vue de ses seins. Elle se lève avec grâce, puis me tend une meishi, sa carte de visite.

- Call me, please !

Je la prends du bout des doigts, charmé par sa voix rauque et ses yeux noirs un brin cernés mais si intenses. Je m'efface pour laisser passer, elle disparaît dans le couloir en faisant claquer ses talons. Je passe la tête sous le robinet, mon précieux trophée en poche. Et je quitte le cinéma, incapable de me concentrer sur ce qui se passe à l'écran...

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